Eco-responsable
De Ben, Thibault Segouin
Mis en scène par Thibault Segouin, Ben
Avec Ben
Théâtre de Poche de la Grenette, Vevey, Suisse
Produit par LOJ Productions (producteur), Théâtre de Poche de la Grenette (organisateur)
Représentation du mercredi 30 septembre 2015 à 20h00
Placé en (placement libre)
Payé 35.00 CHF
Ben et son look écolo, autant absurde que le reste du spectacle !
[photo de François Darmigny, via Tourisme Landes]
Ben ; voilà encore un humoriste que j’ai découvert grâce à On n’demande qu’à en rire, notamment dans ses duos avec Arnaud Tsamere. Et voilà qu’entre ses dates parisiennes, où il a un beau succès me semble-t-il, il est venu faire un détour de cinq soirées du côté d’une cave veveysanne, autrement nommée Théâtre de Poche de la Grenette, l’occasion d’aller découvrir son spectacle.
Les coulisses ne permettant pas un accès direct à la petite scène du théâtre, l’humoriste est obligé de traverser le public pour la rejoindre. Il y arrive sans grande énergie, son téléphone portable à la main, et débute son spectacle de la façon la plus molle que je n’aie jamais vue dans un one man show. Si l’effet est amusant dans cette petite salle conviviale, il doit être bien plus absurde encore sur une véritable scène. Ce qui me fait penser que la mise en scène a probablement été adaptée vue la configuration des lieux, et qu’il y a certainement quelques différences entre le spectacle auquel j’ai assisté et sa version parisienne.
Quoi qu’il en soit, le spectacle ne va pas s’emballer par la suite, Ben contrôlant avec une aisance assez étonnante ce rythme à contre-courrant. Il nous mènera d’un sujet absurde à un autre sans qu’il soit possible de comprendre comment la transition s’est faite. Très souvent, l’enchaînement est tellement bordélique qu’il est impossible de se souvenir de quel sujet il était fait mention deux minutes plus tôt ! Il n’y a aucun liant, mais là où ça serait un défaut pour n’importe quel humoriste, c’est parfaitement assumé par Ben et ça fonctionne étonnamment plutôt bien.
L’aspect sérieux que Ben a sur cette photo est assez déconcertant quand on sait à quel point le spectacle part dans tous les sens !
[photo de Constance Decorde, via le site de la ville de Cormeille-en-Parisis]
Outre le rythme, l’humoriste a un autre talent : sa maitrise des effets de style. En effet, il utilise de façon assez virtuose les silences, et se permet même d’aller jeter un oeil à son téléphone posé dans un coin de la scène à plusieurs reprises au cours du spectacle. Il arrive aussi à prendre le contre-pied de sa lenteur et de sa molesse en élevant quelquefois la voix, provoquant un effet comique très amusant. Il ose même le comique de répétition et a l’art de faire rire avec des vannes d’un niveau consternant. Bref, au rayon technique, Ben est au top.
Il me reste à parler du texte, ce qui ne va pas être facile tellement j’ai du mal à me rappeler des différents sujets abordés vu comme ça part dans tous les sens. Je sais qu’il y a un moment très drôle (mais bien trop court) sur les critiques de spectacles, où Ben se moque autant bien des mini-critiques web, signés par des pseudos ridicules et utilisant des règles de ponctuation étonnantes, que des critiques plus élaborées utilisant toujours les même termes et recyclant à l’infini l’expression “fils spirituel de Desproges”.
Autre joli moment d’absurde, la description de sa vie d’excès pendant sa jeunesse, entre folles soirées se terminant à 23h et surplus d’alcool… ou presque ! Quand au moment donnant son titre au spectacle, à savoir celui consacré à l’écologie, il est en fait plutôt passable – à se demander pourquoi ce titre a été retenu.
Cette cravate est sublime
[photo de Constance Decorde, via Hier au théâtre]
Et voilà, j’arrive déjà au moment de la conclusion. Première remarque, le spectacle est court, très court, je n’ai pas chronométré mais il me semble bien que la barre de l’heure n’a même pas été franchie. Ca m’arrive très rarement, mais j’ai eu l’impression en sortant du spectacle d’avoir payé ma place trop chère (35 CHF), ce qui est quand même plutôt mauvais signe… A côté de ça, Ben est un humoriste faisant preuve d’une grande virtuosité technique (lenteur, manque d’énergie simulé, silences, niveaux de voix, comique de répétition, etc.), lui permettant de s’affranchir de la contrainte d’avoir un fil rouge. Malheureusement, le texte est en demi-teinte, oscillant entre belles trouvailles à l’absurdité remarquée et moments un peu trop quelconques. Forcément, sur un spectacle si court, ça ne pardonne pas et laisse aux spectateurs un petit arrière-goût d’inachevé. Dommage, mais prometteur.